ParapharmacieSanté

Les morphiniques : Utilisation dans la prise en charge des douleurs rhumatologiques

Ces récentes années, la prescription des morphiniques dans le cadre des affections douloureuses a connu une véritable évolution et augmentation. Autrefois, ces médicaments étaient uniquement employés contre les douleurs cancéreuses. Depuis peu, ils interviennent aussi dans le traitement des algies de l’abdomen, celles de la traumatologie et même de la rhumatologie. Étant donné que les morphiniques constituent des analgésiques assez puissants puis sont à l’origine de nombreux effets secondaires, leur utilisation doit strictement respecter les règles thérapeutiques. Quelles sont celles exigées en matière de douleurs rhumatologiques ? Voici le point.

Les morphiniques : Identification du type de douleur rhumatologique

En rhumatologie, une correcte prise en charge des situations cliniques douloureuses exige en premier lieu d’identifier leurs caractéristiques. Ce préalable permettra de catégoriser l’algie. Ainsi, en ce qui concerne la classification des douleurs, il faut retenir que ces dernières appartiennent à six familles à savoir :

  • Aiguë ;
  • Chronique ;
  • Neurogène ;
  • Nociceptive ;
  • Neuropathique ;
  • Mixte.

Quand il s’agit de la forme que peut prendre l’algie, seules les deux premières classes sont concernées. À ce niveau, la douleur sera désignée d’aiguë si elle est d’apparition récente. C’est-à-dire que son installation doit dater de moins de 3 mois. Si l’algie a affecté la qualité de vie de l’individu, c’est le signe qu’elle est de nature chronique.

En ce qui concerne les quatre autres catégories, elles qualifient les divers mécanismes physiopathologiques de l’affection. Ainsi, cette dernière sera dite nociceptive si elle semble due à une stimulation exagérée des récepteurs périphériques. En revanche, des lésions au niveau du système nerveux qualifient une douleur neuropathique.

L’algie fera cependant partie de la classe neurogène si aucune lésion n’est identifiée au niveau des tissus. La catégorie mixte quant à elle se trouve à mi-chemin entre les familles nociceptive et neurogène. En rhumatologie, la plupart des douleurs sont de cette typologie.

Les morphiniques : Évaluation de la douleur rhumatologique

La prise en charge de la douleur doit se poursuivre avec la phase de l’évaluation. Ici, il va s’agir de quantifier l’algie ou en termes plus simples de la mesurer. Une telle tâche n’est pas à la charge du praticien. Concrètement, il revient au patient lui-même de remplir cette mission. Celle-ci s’effectue grâce à des outils dénommés échelles globales.

Ces dernières (les plus utilisées) sont au nombre de trois et il s’agit de l’échelle :

  • Numérique (EN) ;
  • Verbale simple (EVS) ;
  • Visuelle Analogique (EVA).

La nature de la douleur n’empêche pas de faire emploi de l’un ou l’autre de ces outils. Il faut retenir que l’évaluation de l’algie s’avère plus complexe lorsque cette dernière est de type chronique. Pour effectuer alors une bonne quantification, l’opération doit prendre en compte les facteurs :

  • Comportementaux ;
  • Cognitifs ;
  • Affectivoémotionnels ;
  • Sensoridiscriminatifs

Il faudra également considérer le contexte socioprofessionnel et familial du malade. Par ailleurs, des recherches ont déjà permis de savoir que spécifiquement la douleur aiguë peut avoir sur l’échelle visuelle analogique une valeur de 70 mm.

Les morphiniques : Le traitement de la douleur en rhumatologie

Les antalgiques sont des médicaments disponibles en plusieurs types. De même, il existe divers niveaux de douleurs. Pour effectuer un choix approprié du traitement en fonction du type d’algie, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a classé les antalgiques en trois paliers. Le premier palier est celui des non opioïdes et il rassemble :

  • Les anti-inflammatoires ;
  • L’aspirine ;
  • Le paracétamol.

Le deuxième palier est constitué du tramadol et de la codéine. Il constitue la catégorie des opioïdes mineurs. Quant au dernier palier, c’est celui des opioïdes majeurs ou forts. En France, cette famille est composée de six produits avec la morphine occupant la place principale.

Selon les recommandations de l’OMS, ce médicament de référence ne s’emploie que lorsqu’un antalgique de palier 2 s’est révélé inefficace dans le traitement de la douleur. En présence d’une algie rhumatologique, les conditions d’usage des morphiniques semblent un peu plus spécifiques.

Les situations de prescription des morphiniques

Lorsqu’il s’agit de prescrire un médicament de la classe thérapeutique des morphiniques à un patient, deux actions sont possibles.

Une prescription d’emblée du morphinique

Le morphinique doit sans avoir de doute être recommandé au patient lorsque la douleur de ce dernier sur l’EVA est de 70 mm. Ce geste reste valable si le sujet n’avait au préalable reçu aucun antidouleur. En ce qui concerne la posologie du médicament, elle doit respecter certaines règles à savoir :

  • Administrer par libération prolongée toutes les 12 h 30 mg du médicament au début du traitement ;
  • Faire prendre au patient 2 fois par jour 10 mg de morphine ou ;
  • Le mettre sous un traitement à libération immédiate.

Ces deux derniers points concernent les personnes âgées. Quel que soit l’âge du malade, il est lorsque l’EVA ne donne pas de résultats satisfaisants possibles de compléter toutes les 1 à 4 h des doses de morphine à libération immédiate.

L’observation d’un intervalle de prescription

Il existe de ces cas où le malade a reçu un antalgique de palier 2 sans obtenir un soulagement en ce qui concerne les douleurs qu’il ressent. Dans ce genre de situation, la démarche à adopter consiste à patienter 3 à 6 h de temps environ avant de lui administrer la morphine. Cela va se faire à libération prolongée.

Les morphiniques : Les limites de leur prescription dans les douleurs rhumatologiques

En rhumatologie, un traitement à base de morphiniques dans le cadre de la prise en charge de douleurs doit respecter le principe de la cure courte. Cela signifie que l’opioïde devra être administré sur une durée de 1 semaine au moins sans excéder le délai de 28 jours.

Pour les prises, la dose moyenne est de 60 mg (30 mg matin et soir constitue la meilleure posologie). Celle maximale est de 150 mg. Si ce dosage doit être dépassé, un avis médical est nécessaire.

L’adaptation des doses selon la situation clinique du patient

Lorsque le malade estime que c’est dans la soirée que ses douleurs s’intensifient, il doit recevoir par jour 40 mg de morphine, à raison de 30 mg le soir et 10 mg le matin. Lorsque c’est la situation inverse qui se produit, la dose du morphinique doit être plus élevée le matin, soit de 30 mg. Le soir, il faut la réduire à 10 mg.

Ces règles sont à appliquer au cours d’un nycthémère. Lorsque le sujet pratique certaines activités comme la marche ou la kinésithérapie où le risque de ressentir des douleurs semble élevé, il faut lui donner 45 min avant l’événement de la morphine. Cette administration doit être à libération immédiate et se faire en interdoses de 10 mg.

La réévaluation de la douleur

Les symptômes associés à la douleur que présente le patient doivent être à nouveau évalués, mais cette fois-ci tous les 1 à 2 jours. Cette précaution doit être mise en œuvre dès le début du traitement. Si suite à cette démarche, il s’avère que le malade ne constate pas un véritable soulagement, la règle est d’augmenter de 50 % le dosage du morphinique à libération prolongée.

Les morphiniques : Les précautions pour une prise en charge réussie de la douleur

Pour le traitement des douleurs en rhumatologie, les morphiniques sont vraiment fiables. Ce qui rebute parfois certains praticiens à les prescrire sont les divers effets secondaires qu’ils provoquent. Dans le cadre d’une cure courte, les signes d’intolérance généralement déclarés par les patients sont au nombre de 3 à savoir :

  • Somnolence ;
  • Constipation ;
  • Nausées voire vomissements.

Dans l’optique de favoriser la réussite du traitement, il est conseillé de prévenir ces événements indésirables. Ainsi, avec les laxatifs, il est possible d’éviter la constipation au malade. Le même objectif peut être atteint avec la pratique d’exercices physiques et l’observation de règles hygiéno-diététiques comme :

  • Consommer des légumes et fruits ;
  • Boire assez d’eau ;
  • Limiter sa consommation en chocolat et riz.

En ce qui concerne les vomissements et nausées, ils se préviennent avec des antiémétiques. Généralement, ces événements sont transitoires. Ils peuvent donc disparaître sans qu’aucun médicament ne soit pris dans ce cadre. Quant aux cas de somnolence, il est possible de les éviter en ayant de bonnes nuits de sommeil.

L’obtention du consentement du patient

Avant de débuter le traitement à base de morphiniques, le patient doit être informé de la nature du médicament. Concrètement, il doit être mis au courant des raisons pour lesquelles le produit lui sera administré et de ses effets secondaires.

Après cela, le praticien doit demander l’accord du malade pour mettre en place le traitement. Généralement, il n’y a pas de difficultés à obtenir le consentement du sujet en raison du motif d’inefficacité lié aux analgésiques du dernier palier.

La surveillance du patient

Les morphiniques sont capables de provoquer une dépression respiratoire de même qu’un état de tolérance lorsqu’ils sont consommés sur une longue période. Durant le traitement, le patient doit faire l’objet d’un suivi spécifique afin d’identifier à temps de tels événements.

Par ailleurs, il semble nécessaire de préciser que la dépression respiratoire constitue un signe de surdosage du médicament. Face à une telle situation, la meilleure solution est d’administrer au patient de la naloxone. Il s’agit de l’antidote de la morphine.

Les contre-indications de prescription

Il existe certaines situations où la prescription de morphinique peut conduire à la mort du patient. Il s’agit des cas d’insuffisance :

  • Rénale sévère ;
  • Hépato-cellulaire sévère ;
  • Respiratoire décompensée.

Un malade atteint d’asthme grave ne peut également pas recevoir de morphiniques. Outre cela, ces produits ne s’associent pas à la buprénorphine.

L’arrêt progressif du traitement

Étant donné que l’usage des morphiniques dans la prise en charge des douleurs rhumatologiques s’effectue en cure courte, le patient ne doit normalement pas présenter à l’arrêt du traitement des signes de syndrome de sevrage. Une telle situation peut bel et bien survenir.

Pour la prévenir, il est conseillé de suspendre progressivement la consommation du médicament. Le médecin peut décroître les doses ou miser sur l’administration d’antalgiques d’un palier plus bas.

 

Articles Liés

Bouton retour en haut de la page