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ALLAITEMENT : ANTALGIQUES ET AUTRES MÉDICAMENTS SANS DANGER

De nombreuses mères allaitantes s’interrogent sur la compatibilité de suivre un traitement contre la douleur malgré leur état. En réalité, selon les idées reçues, la plupart des médicaments passent dans le lait maternel. Cela peut alors présenter un risque important pour le nourrisson. Pour cette raison, des chercheurs, sur la base de quelques études, ont pu établir une liste de médicaments dits « sans danger », comme les antalgiques. Comment expliquer le passage des médicaments dans le lait maternel ? Quels sont les antalgiques compatibles et quels sont les probables effets indésirables ? Quels sont ceux à éviter ?

Passage des médicaments dans le lait maternel : quelle explication ?

Les experts estiment que la plupart des médicaments sont susceptibles de passer dans le lait maternel. Toutefois, les exceptions observées sont l’insuline et l’héparine qui comprennent des molécules volumineuses. Par conséquent, elles ne parviennent pas à traverser les membranes cellulaires.

Ce passage des médicaments du plasma de la femme allaitante au lait se fait grâce à un processus appelé la diffusion passive (transport passif). On parle de diffusion passive lorsque les ions ou les molécules traversent une membrane sans aucun apport d’énergie.

Néanmoins, lorsque les médicaments sont pris suivant des doses thérapeutiques, ils n’ont aucun effet. Autrement dit, leur concentration dans le lait maternel est très faible. Cependant, le compartiment peut en recevoir une quantité importante lors du passage de ces substances. Cela dépend bien évidemment de plusieurs facteurs.

La dose du médicament

S’agissant de la dose du médicament, les experts estiment en réalité que pour qu’un médicament soit sûr, la dose infantile doit être inférieure ou égale à 10 % comparativement à celle de la mère. Pour calculer ce pourcentage, la formule suivante peut être employée : Dn (mg/kg/jour) = Cm (mg/L) x L/P (ASC) x Vn (L/kg/jour).

Dn représente la dose infantile et Cm la concentration plasmatique du médicament dans le lait maternel. Le rapport L/P (ASC) désigne le rapport des concentrations entre le lait et le plasma en fonction de l’aire sous la courbe. Il s’agit de la mesure du temps passé par un médicament et de sa quantité dans le corps.

La voie d’administration et la lipophilie

Les médicaments administrés par voie topique (vaporisateurs nasaux, crèmes, inhalateurs) sont considérés comme sans effet sur le nourrisson. En effet, leurs concentrations sont généralement très faibles dans le plasma de la mère et par conséquent dans le lait maternel.

Par ailleurs, la capacité des médicaments à pénétrer les graisses, influe grandement sur leur quantité dans le lait maternel. Autrement dit, plus ils sont lipophiles, plus ils ont de facilité à passer dans le lait.

La liaison aux protéines et la demi-vie

La concentration d’un médicament dans le lait maternel dépend de sa capacité à se lier aux protéines plasmatiques de la mère. En effet, ceux qui se lient aux protéines traversent moins facilement le lait.

En outre, la durée de l’action du médicament dans le sang maternel ; c’est-à-dire la demi-vie, favorise ou non le passage. C’est la raison pour laquelle il est recommandé de prêter grande attention aux médicaments qui ont une longue demi-vie. Ils s’accumulent progressivement dans le plasma de la mère.

Le rapport entre les concentrations et la capacité d’absorption

Il existe une corrélation entre la concentration de médicament dans le lait maternel et celle dans le plasma. Elle représente d’ailleurs un facteur non négligeable. En réalité, plus la quantité d’un médicament dans le plasma est élevée, plus ses molécules sont présentes dans le lait maternel. On parle du rapport L/P. Outre ce rapport, les experts recommandent de prendre en compte la capacité d’absorption de ce médicament par l’intestin de la mère et du nourrisson (biodisponibilité).

L’état de santé et l’âge du nourrisson

Les nouveau-nés, en particulier les bébés prématurés, présentent un plus grand risque d’avoir des concentrations élevées de médicaments dans leur sang. Elles sont dues aux quantités contenues dans le lait maternel de leurs mères. Cela s’explique par l’immaturité du foie et des reins qui transforment et éliminent ces substances.

Le jour de la lactation

Pendant les premiers jours de sa vie, le colostrum (premier lait maternel) est pris par le nouveau-né en quantité très faible. Par conséquent, la concentration qui lui parviendrait si sa mère avait pris quelques médicaments serait également très faible. Dans le cas où ceux-ci sont recommandés, leur présence ne constituerait aucun risque pour le nourrisson.

Il existe donc une branche de la médecine qui s’occupe précisément d’évaluer les effets de chaque médicament. Les chercheurs qui s’y consacrent tiennent compte de tous les paramètres listés et du niveau de sécurité de chaque médicament pendant l’allaitement. Aussi, ils doivent vérifier si celui-ci peut être utilisé et dans quelles conditions. Les praticiens doivent alors maitriser cette liste de médicaments afin d’aider les femmes qui allaitent dans la mesure du possible.

Allaitement : antalgiques et autres médicaments recommandés

Allaitement : autres médicaments recommandés

Comme annoncé, voici la liste des antalgiques et des autres médicaments sans danger aussi bien pour la femme allaitante que pour son nourrisson.

Ibuprofène

L’ibuprofène est un médicament qui appartient normalement à la famille des anti-inflammatoires non stéroïdiens « AINS. Toutefois, chez les femmes allaitantes, il peut être utilisé pour le traitement de la douleur (antalgique). Lorsqu’il est respectivement recommandé pour traiter l’inflammation et de la fièvre, il devient un anti-inflammatoire et un antipyrétique.

Ce médicament est en général disponible sans ordonnance et sous plusieurs noms. De plus, il peut être administré par voie intraveineuse, orale et topique. Les concentrations présentes dans le lait maternel sont très basses. Par conséquent, la dose qu’un nourrisson prend pendant la tétée est également bien inférieure à la dose prescrite aux bébés. On précise alors que c’est un antalgique sûr, d’ailleurs employé par de nombreuses femmes allaitantes.

Par ailleurs, voici les effets indésirables les plus observés :

  • Diarrhée ;
  • Vomissements ;
  • Douleur avec saignement ;
  • Démangeaisons ;
  • Troubles rénaux.

Ces effets sont si rares qu’ils apparaissent seulement en raison d’un dosage non recommandé ou d’une utilisation prolongée.

Paracétamol

Le paracétamol est le médicament le plus indiqué en cas de fièvre. En effet, il passe dans le lait en faible quantité et est également utilisé chez le nouveau-né. Ainsi, la concentration présente dans le lait de la mère est très négligeable comparativement à celle qui lui serait administrée contre la fièvre. Il est également très utile contre la douleur causée par des hémorroïdes.

Aspirine

L’aspirine encore connue sous le nom acide acétylsalicylique est un anti-inflammatoire non stéroïdien (AINS) utilisé pour traiter :

  • La fièvre (antipyrétique)
  • L’inflammation (anti-inflammatoire) ;
  • La douleur (antalgique).

Lorsqu’elle est prise à petites doses, l’aspirine peut agir comme agent antiplaquettaire. Les voies d’administration sont orales (poudre, capsules ou comprimés) et intraveineuses (eau pour préparation injectable de la proamp).

En outre, l’aspirine est un médicament peu sûr. De fait, la quantité qui traverse les membranes du compartiment du lait maternel varie selon la posologie. Elle varie également selon la durée du traitement de la mère.

Cependant, en tant qu’agent antiplaquettaire ou pour une utilisation occasionnelle, il est considéré comme sûr. En cas d’administration répétée comme analgésique ou anti-inflammatoire, il est conseillé de le remplacer par des médicaments plus sûrs. On peut notamment citer l’ibuprofène et le paracétamol.

Autres médicaments autorisés

Outre les antalgiques, voici la liste des médicaments supposés sûrs et sans danger pendant l’allaitement.

Les anthelminthiques

Cette classe de médicaments regroupe le mébendazole ou l’embonate de pyrantel. Les chercheurs n’ont pas assez de données sur le passage de ces substances dans le lait maternel chez la femme. Cependant, les anthelminthiques sont considérés comme “sûrs”, car ils ont une mauvaise absorption par le tractus gastro-intestinal.

Les antibiotiques

Les antibiotiques, notamment les pénicillines, les macrolides et les céphalosporines sont aussi considérés comme sans danger pendant l’allaitement. Toutefois, il convient de mentionner qu’il existe des risques théoriques d’altération de la flore intestinale du nourrisson et de sensibilisation allergique.

Quant au métronidazole, sa fiabilité est toujours, car on a noté un transfert en quantité suffisante dans le lait maternel. De plus, la dose infantile modifiée en fonction du poids peut être supérieure à 36 % de celle maternelle.

Cela indique clairement que le risque d’exposition de l’enfant peut être supérieur au seuil arbitraire de 10 %. Les techniques qui peuvent être envisagées pour minimiser l’exposition du nourrisson comprennent le choix d’un autre antibiotique (amoxicilline ou acide clavulanique).

Les anticonvulsivants ou antiépileptiques

La carbamazépine, la phénytoïne et le valproate de sodium sont généralement considérés comme sûrs pendant l’allaitement. On doit néanmoins préciser que le nourrisson doit être surveillé afin qu’on décèle des signes éventuels de dépression du système nerveux central.

Les anticoagulants

Les héparines, comme déjà énoncé, ont des molécules volumineuses. Elles semblent être sans danger, car vu leur poids, elles ne peuvent pas passer dans le lait maternel. Du moins, pas en quantité importante en raison de leur mauvaise absorption.

La warfarine est également sûre pendant l’allaitement, car elle a un faible taux pendant l’allaitement. Ses effets indésirables sont également très peu importants et les modifications du temps de prothrombine n’ont pas été détectées chez les nourrissons allaités. Cependant, il serait prudent de surveiller ce dernier.

Les antidépresseurs :

Les antidépresseurs comme les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS) vont dans le lait maternel à des degrés divers. Par exemple, la paroxétine aurait la plus basse quantité avec une dose infantile de 1 à 3 %.

La fluoxétine, quant à elle, passe plus dans le lait avec une dose infantile ≤ 14 % (ajustée en fonction du poids). En outre, son métabolite actif, la norfluoxétine, a une longue demi-vie d’une à deux semaines. Il peut aussi s’accumuler chez un nourrisson allaité.

Le citalopram a une dose relative chez le nourrisson comprise entre celles de la paroxétine et de la fluoxétine. Sur la base des données, la paroxétine est l’ISRS le plus utilisé par les femmes qui allaitent.

Par ailleurs, plusieurs antidépresseurs tricycliques sont considérés comme sans danger pour les femmes allaitantes et surtout pour le nourrisson. Leurs concentrations dans le lait maternel sont très faibles, ce qui est confirmé par de nombreuses données d’utilisation.

De plus, le moclobémide ne passe pas aussi facilement dans le lait de la femme allaitante. Il est donc considéré comme sûr.

Les benzodiazépines :

Cette classe de médicaments a des demi-vies plasmatiques courtes. Par exemple, on peut citer le midazolam et le témazépam, qui sont donc peu susceptibles de poser un problème. En réalité, après les études, ils ne se retrouvent qu’en faibles quantités dans le lait de la femme qui allaite.

Les antihistaminiques

Les antihistaminiques (contre l’histamine) dont la prométhazine, la dexchlorphéniramine et la diphénhydramine semblent être sûres lors de l’allaitement. Cependant, il existe peu de données sur les antihistaminiques non sédatifs, bien que la loratadine et la fexofénadine soient probablement sans danger. Ces dernières passent moins à travers les membranes cellulaires du compartiment du lait.

En revanche, les benzodiazépines, notamment le diazépam, ont une longue demi-vie. Ils peuvent alors s’accumuler chez le nouveau-né en cas d’exposition prolongée.

Les décongestionnants

Il est peu probable qu’une courte cure de pseudoéphédrine (dose nourrissons y sont moins exposés.

Allaitement : médicaments à éviter

Allaitement : médicaments à éviter

Les médicaments à éviter doivent respecter les critères ressortis dans les facteurs qui influencent leurs concentrations dans le lait maternel. Parmi eux figurent :

  • La codéine: ce médicament est un opioïde naturel qui peut être converti en morphine. La quantité produite par cette dernière ainsi que la vitesse de production varient souvent d’une femme à une autre. Ainsi, utilisant cette substance, la femme allaitante pourrait accélérer la production de la morphine exposant son nourrisson. Comme alternative, on peut recommander la dihydrocodéine, qui contrairement à la codéine initiale est sans danger.
  • Les autres opioïdes : ils passent très souvent dans le lait de la femme enceinte pouvant provoquer de nombreux effets (irritabilité, somnolence). Alors, pour ces raisons les chercheurs les déconseillent vivement pendant l’allaitement.

D’autre part, un arrêt des médicaments est la solution la plus recommandée dans certains cas. Ils constituent alors des contre-indications. Il s’agit :

  • Des médicaments antitumoraux (cyclophosphamide, doxorubicine, méthotrexate) ;
  • Des substances utilisées en radio diagnostic ;
  • Des médicaments antithyroïdiens (en dehors du thiouracile) ;
  • Du chloramphénicol.

Dans ces cas précis, il est nécessaire que la mère arrête l’allaitement. D’autres doivent le faire temporairement, jusqu’à la fin de la thérapie. Le pédiatre consulté fournira des informations sur la manière de maintenir la production de lait jusqu’à la reprise de l’allaitement.

Allaitement : recommandations utiles pour professionnels et mamans allaitantes

Voici quelques recommandations utiles pour les professionnels de santé et pour les femmes qui allaitent leur nourrisson.

Professionnels de santé

Les acteurs de la santé doivent toujours se souvenir des médicaments qui ont fait l’objet d’une expérience clinique prouvée dans l’allaitement. Ceux-là sont à privilégier. De plus, il faudra prendre le soin d’éviter les médicaments à longue durée d’action.

En outre, les professionnels doivent opter pour la voie d’administration qui minimise le passage des médicaments dans le lait. Par ailleurs, ils doivent faire d’une priorité les médicaments non absorbés ou mal absorbés par le tractus gastro-intestinal. La dose thérapeutique la plus efficace doit aussi être celle qu’il faudra privilégier.

D’un autre côté, si un médicament est absolument contre-indiqué dans l’allaitement, les praticiens doivent en informer les mères. Surtout s’il est possible d’interrompre l’allaitement puis de le reprendre ultérieurement. Dans ce cas, il faut également leur expliquer comment maintenir la production de lait à la main ou à l’aide d’un tire — lait.

Femmes allaitantes

Si le médecin rassure une femme allaitante qui s’inquiète sur le fait qu’elle devrait prendre un certain médicament, elle peut le faire en toute confiance. Cependant, elle devra prendre quelques précautions : prendre le médicament après la tétée de son enfant afin d’assurer un temps de métabolisme maximum avant la prochaine tétée. Cette précaution est particulièrement justifiée pour les médicaments qui ont un temps de métabolisme court. La seconde précaution sera de surveiller le nourrisson dans le cas où il présenterait un quelconque effet indésirable.

 

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